Niveau météo, on nage pas encore dans la folie. Il y a encore aujourd’hui de gros nuages un peu partout, des petites averses et quelques orages en montagne. Mais le pire est passé, notamment les orages de la semaine dernière, qui laissent derrières eux quelques “fulguré·es”.
Les orages sont en plein dans l’actualité : La semaine dernière, la foudre a frappé l’avion du tennisman allemand Alexander Zverev sur son trajet pour Rolland Garros, qu’il a dû arrêter. Il y a quelques jours aussi, un éclair dans le Tarn et Garonne a explosé des records avec une puissance de 516.000 ampères, vingt fois plus intense que la moyenne des chutes de foudre françaises (d’après la page Facebook de l’Observatoire Keraunos, qui analyse les orages et les tornades).
Il y a une dizaine de jours, deux personnes ont été frappées par un éclair à la Barbe, près d’Aix-en-Provence. Peut-être que ces deux individus feront avancer la science, puisque la science des orages étudie ces “foudroyé·es”, qu’on appelle précisément les “fulguré·es”. C’est le cas par exemple des 14 personnes que la foudre a traversées en septembre 2017 à Azerailles, au sud de Nancy, dans un festival de rock. Un même éclair de millions de volts les a tous·tes touché·es et chamboulé leur vie.
Raphaëlle Manceau, fulgurée, a “attrapé l’accent alsacien”
L’une des fulgurées de 2017, Raphaëlle Manceau, raconte au journal Le Monde que juste après ce foudroiement, elle a eu des genres de superpouvoirs, capable en même temps de faire des multiplications de trois chiffres par trois chiffres, de fredonner un petit air, de mettre au point l’organisation du lendemain, et explique qu’elle retrouvait même des souvenirs d’enfance enfouis. Cette performance n’a duré que quelques semaines, puisque après, c’est de la fatigue, des douleurs aux jambes, des pertes de mémoire, une écriture qui devient enfantine, ou encore un accent alsacien “attrapé”.
La foudre marque le corps et le mental
Ces étranges symptômes post-foudre ont intéressé un médecin de la ville, Rémi Foussat, qui a suivi les 14 miraculés ensuite pendant 8 ans. Le médecin a étudié les différents effets secondaires survenus sur ces fulguré·es et a notamment confirmé dans son étude de cas la thèse d’une géologue du CNRS : la foudre laisse une trace dans le corps humain. On retrouve le marqueur biologique dans le sang et les urines. Découvert récemment également, la foudre peut laisser des séquelles psychologiques, comme des symptômes de stress post-traumatiques.
Rémi Foussat fait partie des rares scientifiques à s’intéresser au sujet, il a carrément inventé son titre de “kéraunologue” (keraunos signifiant foudre en grec). Celui-ci fait avancer la recherche, il a collaboré avec une quinzaine d’autres chercheurs et publiera une étude complète début 2026.
La fulgurance : un phénomène qui sort de l’ombre
La médecine de la foudre est clairement une médecine de niche, avec une dizaine de spécialistes au total dans le monde. Pourtant, il faudrait créer la case “frappé·e par la foudre” dans les formulaires médicaux pour comprendre les suites, et aussi parce que si pour le moment, il y a 200-300 cas par an, le phénomène va de plus en plus se produire avec le réchauffement climatique.
Les fulguré·es sont au cœur d’une mini-série de trois épisodes, sélectionnée à Cannes Séries en avril “Fulgurée, quand la foudre ne tue pas”. Réalisée par Emilie Grall et Mickaël Royer, la série documentaire sera diffusée le 2 juin sur Planète + Aventure (groupe Canal +).
Phénomène peu investi scientifiquement et médiatiquement, cette série est l’opportunité pour ces fulguré·es d’être vu·es et reconnu·es. Lors de l’Avant Première de “Fulgurée, quand la foudre de tue pas”, Raphaëlle Manceau s’est exprimée pour dire un “grand merci” aux réalisateur·ices et scénaristes, sans qui “le message qu’on voulait faire passer pour que notre histoire n’ait pas servi à rien n’aurait pas pu exister.«