Obsedées par la pop (culture) ou le jazz, les sorties de la semaine ont un sacré tempo
Qu’est-ce qui rapproche les accros à la pop culture et la cinéphilie ? Peut-être bien une grosse part de fétichisme. Elle est au centre du cinéma d’Hélène Cattet et Bruno Forzani, dont les films débordent d’amour pour le cinéma populaire européen déviant des années 60-70. À l’époque, on parlait d’Euro-trash, mais il incarne une forme de pureté, voire de jouissance visuelle et narrative. A travers un ancien espion vivant désormais plus dans ses souvenirs de mission périlleuse que dans son présent de vieillard, ressuscite l’inventivité et la démesure des fumetti, ces romans pulp italiens qui faisaient le délice des foules, quelque part entre Fantômas et James Bond, dans une version plus sexy.
Cattet et Forzani ne se contentent pourtant pas que d’un hommage plus que vibrant. Là où un Tarantino se serait contenté d’aligner des références, Reflets dans un diamant mort cache sous l’épiderme d’un film ultra-stylisé définitivement sensoriel, un regard sur le virilisme et l’idéal masculin d’hier et d’aujourd’hui. La créativité baroque (ici, on démarre par un générique de fin quand on ne transforme pas entre autres une robe Paco Rabanne ou des faux ongles en arme mortelles) se fait passerelle entre arts de l’illusion d’optique et psychanalytique. Reflets dans dans un diamant mort scintillant comme les éclats d’un miroir brisé devenus kaléidoscopiques, chaque image, chaque scène portée par des idées folles étant comme une illumination pour l’imaginaire.
Si musicalement, Reflets dans un diamant mort ouvre une malle aux trésors italienne, entre lounge et pop psychédélique façon Ennio Morricone ou Bruno Nicolai, Au rythme de Vera se dédie au jazz. Surtout celui qui décoinça l’Allemagne de l’ouest dans les années 70. C’est à Cologne que Keith Jarrett enregistra le fameux Köln 75, concert resté mythique et disque de jazz contemporain le plus vendu de l’histoire. Au rythme de Vera en grave une face B en s’interessant à la jeune femme de 17 ans qui l’a produit.
Contrairement à Jarrett qui improvisait ses concerts, le réalisateur Ido Fluk et l’épatante actrice Mala Emde construisent joliment à la fois un portrait d’époque conservatrice commençant à se fissurer et une ode à une jeunesse impulsive. Les deux se rejoignent dans la juxtaposition d’un Jarrett intériorisé et d’une Vera exubérante, mais tous deux en quête d’une même liberté, pour un film tout en swing, quand il assure que le sens de la vie tient à l’art de savoir improviser.
Reflets dans un diamant mort, Au rythme de Vera en salles le 25 juin.