Le rêve, cet inconnu !
Belle idée : le beau musée Cantini de Marseille réunit des tableaux du XXe siècle sur le thème du rêve. Ambitieux programme !
Sont omniprésents : les Surréalistes bien sûr, mais aussi quelques francs-tireurs (Hans Bellmer, Bernard Plossu) et des avant-gardistes du XIXe siècle comme Odilon Redon, Victor Hugo, Auguste Rodin…les romantiques visionnaires.
Enfin des artistes peu connus comme Bernard Valère, symboliste morbide dans la lignée de Francisco Goya, Felicien Rops… Moins aimés des grandes expos car plus durs à digérer.
Le Rêve d’ailleurs reste UNDERGROUND, les songes mystérieux, éternellement commentés et jamais cernés, échappant à toute définition, à toute logique ou compréhension. La part de l’humanité inclassable, anarchique et scandaleuse.
Et tous les Sigmund Freud, André Breton et autre Bryon Gysin qui ont tenté de s’y faire une place dans le carré VIP, d’en trouver des clés ou des chemins d’entrée, s’y sont cassé les dents.
Freud et ses ridicules obsessions sexuelles et familiales, qu’il a plaqué sur le monde entier, comme si le petit Sigmund était universel ! Ignorant le reste des civilisations, africaines, mésoaméricaines, asiatiques, dont les symboles et l’inconscient sont différents…
Le Proviseur Breton, flic des surréalistes copieurs et de leurs clichés soi-disant absurdes (copiés sur DADA) , genre « parapluie sur une table d’opération », paysages désolés avec œil flottant et main coupée. Ce même petit André qui « excluait » les plus doués comme MOLINIER et en l’occurrence Felix Labisse, le JEROME BOSCH de la bande (sans parler de Georges Bataille, Robert Desnos ou Michel Leiris).
Cette expo vous montrera quelques images, quelques flashs d’artistes européens – mais il faudrait aussi voir les CHINOIS, les HINDOUS, maitres des impressions oniriques -, qui ont eu le déclic de vouloir fixer leurs nuits, leur subconscient ramenés à des scènes simplifiées.
Mais comment pourrait-il y avoir des « EXTRAITS » figés de nos RÊVES, qui ne sont que fluidité, superpositions, émotions, vertiges, angoisses, déceptions, disparitions, glissements, chutes et autres accidents, le tout nimbé de désir, des jouissance et d’horreur ?
Nos rêves échappent à tout classement, définition, traduction : ils sont l’abîme de nos impressions, frustrations, contradictions, paradoxes…
Chaque être projette des images, des photos, comme des films flous et mal montés, dans le désordre avec des mini-scènes de 5 secondes où nous croyons aimer, mourir ou voyager, mais dans des lieux qui n’existent pas, entourés de gens plus ou moins connus, mais hors de leur réalité, comme un casting faussé et revisité.
Les rêves nous aident sans doute à respirer, à réinitialiser nos émotions, à supporter le quotidien… Mais chaque tentative de les expliquer ou de les cerner éclaire une fraction – fausse et incomplète – de cette tour de Babel.
Au moins ces artistes nous offrent naïvement quelques effets de leurs tentatives héroïques de chaque époque, de « fixer » l’insaisissable évasion du réel, et une part d’eux-mêmes.
LE RÊVE. Musée CANTINI, Marseille. Du 17 septembre 2016 au 22 janvier 2017 (avec Dali, Magritte, Ernst, Miro, Tanguy et les autres)
Photo : (c) Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Jean-François Tomasian (c) Adagp, Paris 2016