L’écrivain franco-sénégalais était l’invité de Bintou Simporé dans Néo Géo.
«Un matin de la Grande Guerre, le capitaine Armand siffle l’attaque contre l’ennemi allemand. Les soldats s’élancent. Dans leurs rangs, Alfa Ndiaye et Mademba Diop, deux tirailleurs sénégalais parmi tous ceux qui se battent alors sous le drapeau français. Quelques mètres après avoir jailli de la tranchée, Mademba tombe, blessé à mort, sous les yeux d’Alfa, son ami d’enfance, son plus que frère…»
Voilà la trame narrative de Frère d’âme (Éditions du Seuil), deuxième roman de l’écrivain franco-sénégalais David Diop, qui vient de recevoir le prestigieux Prix Goncourt des Lycéens, version 2018. Maître de conférence en littérature française à l’Université de Pau, David Diop, qui a grandi au Sénégal, s’intéresse depuis des années à la représentation européenne des Africains, aux XVIIe et XVIIIe siècles, afin de comprendre les clichés et le racisme qui, aujourd’hui, demeurent toujours bien présents à l’égard des Africains, et des autres.
L’armée française s’est servie de la propagande
Invité du Néo Géo de Bintou Simporé, l’écrivain franco-sénégalais nous racontait ce roman, qui figurait également dans la sélection pour le Prix Femina.
« L’armée française s’est servie de la propagande afin d’inspirer de la terreur aux ennemis allemands. » Les soldats venus d’Afrique, on les plaçait alors en avant, au front, par nécessité de préserver les soldats Français dit « de souche », et parce que l’homme noir était alors associé, parce que la propagande faisait alors son effet, à l’image de cruauté, de méchanceté.
« Dans ce texte, j’ai voulu jouer sur cette propagande, et la déjouer. Dans mon livre, mon personnage réfléchit à ce qu’on lui demande de faire. Les circonstances font qu’il va perdre la raison, puisqu’il va perdre son meilleur ami, son ‘frère d’âme‘. J’ai également voulu raconter comment ces hommes avaient été des soldats pris dans une propagande qui donnaient des images d’eux, des images que l’on peut finalement voir dans des journaux comme La Baïonnette – un journal date de 1916 – qui passent en revue tous les clichés que l’on pouvait avoir sur les tirailleurs sénégalais. Ces tirailleurs, d’ailleurs, qui ne viennent en fait pas seulement du Sénégal mais de toute l’Afrique de l’Ouest : le Sénégal, le Niger, le Mali actuel, le Burkina Faso. C’est une zone géographique extrêmement étendue. »
L’interview de David Diop dans Néo Géo, à écouter en intégralité
Visuel : (c) Éditions du Seuil