Paroles sincères, regard calme et énergie flottante, Miki était de passage à Amiens pour le festival Minuit Avant La Nuit. Dans un moment suspendu, elle raconte ce que les festivals font résonner en elle.
« Le public ne me connaissait pas forcément, beaucoup venaient juste pour découvrir. J’aime bien cette énergie-là, ce mélange de curiosité et d’écoute. » À Amiens, elle est connue grâce à son clip de « Échec et Mat », dont les images du Buffalo Grill ont fait parler la presse nationale.
Un set plus nerveux… mais une envie de lenteur
Depuis quelque temps, Miki a revu sa setlist : « On a décidé de jouer des chansons qui percutent plus, qui sont moins lentes. » Un choix qui s’adapte au format festival pour accrocher dès les premières minutes. Pourtant, elle confie que le calme lui manque. « J’aime bien les morceaux plus lents. Ils portent des thématiques plus sensibles, plus profondes. C’est un autre type d’émotion. »
Elle donne deux exemples : « Six Semaines », un titre rythmé et plein d’ironie. « Ça parle d’une meuf dans sa cuisine qui en a marre de faire des portions solo », et Héroïne, beaucoup plus introspectif : « Là, on est sur des questions existentielles. C’est plus grave, plus fragile. »
L’après-EP : basculement émotionnel
La sortie de son EP a été un tournant. « Avant, j’avais l’impression que tout ça n’existait que dans ma tête. Depuis la sortie, y a eu un vrai switch. Des gens viennent pleurer dans mes bras, ils me disent merci. Je sens qu’il y a une rencontre maintenant, pas juste un concert. »
Ce rapport au public, elle le vit comme un moment suspendu. Même dans les festivals les plus rythmés : « À We Love Green, j’ai joué juste avant Fcukers, je suis direct allée les écouter. Pas le temps de retourner en loges. » Le lien avec les autres artistes, les retrouvailles entre scènes, font aussi partie du plaisir : « Il y a une espèce de tournée parallèle qui se tisse. On croise les mêmes groupes, on partage. »
Créer chez soi, vibrer ailleurs
Si la scène est collective, la création est d’abord intime. « Mes idées, elles naissent chez moi. Je prends mon temps. J’ai besoin d’être sûre de moi avant de montrer. Il y a un vrai enjeu à chaque texte. » Elle travaille souvent seule sur les paroles, et préfère tester ses intuitions en amont. « La topline, ça peut venir sur le moment, mais les mots, c’est plus sacré. » Sur scène, Miki est seule sans dispositif scénique lourd, malgré l’existence de ses coéquipers en coulisses.
Amiens : un festival entre eau, herbe et engagement
Et justement, à Amiens, le festival Minuit Avant La Nuit cultive cette attention au vivant, à l’instant, et au territoire. Depuis 2018, l’événement s’inscrit dans un parc en cœur de ville, et se donne pour mission de mêler musique, écologie et lien social.
Vincent Risbourg, coordinateur du développement durable, résume les ambitions du festival en trois axes : environnemental, sociétal, économique. « Depuis 2019, on fait tout pour limiter notre empreinte carbone, fédérer localement, et créer un écosystème vertueux. »
Vélos, navettes, et salamandres
Côté environnement, le festival fait figure d’exemple : 17 % des festivaliers viennent à vélo, grâce à un parking de 400 places animé par une association locale. Des navettes nocturnes assurent le retour au camping sans voiture. Le festival fait aussi partie du programme national Festival en Mouvement, dédié aux mobilités douces.
Le respect de la faune et de la flore du parc est central : écocups consignées (dont les recettes peuvent financer un vivarium pour salamandres), collecte et recyclage de mégots via une entreprise spécialisée à Beauvais, pesée des déchets plastiques pour suivre leur réduction.
Accessibilité et prévention
Le festival tient aussi à rester accessible : certains jours sont gratuits, les autres à prix modérés. Il accueille les personnes à mobilité réduite, et s’implique contre les violences sexistes et sexuelles, via la campagne Act Right, des sessions de formation, et le dispositif Angela, qui permet à toute personne en danger de demander de l’aide discrètement.
Produire local, rayonner loin
Sur le plan économique, Minuit Avant La Nuit revendique son ancrage : food trucks, catering, staff, produits agricoles… tout vient de la région. Et les retombées touristiques suivent : hôtels, restaurants, musées profitent du rayonnement du festival. « L’idée, c’est de faire vivre Amiens à travers l’événement », insiste Vincent.
Surtout, apprendre ce qui vient d’Amiens aux Amiénois reste essentiel. Pour l’ouverture du festival, le binôme The Name, qui a composé des musiques de la série Bref., était présent pour que le public découvre qu’eux aussi viennent de cette ville de 136 000 habitants.