Ce matin l’anniversaire d’un disque fou : Things Fall Apart des Roots, 18 morceaux, plus d’une heure de hip-hop qui a marqué un tournant à sa sortie en février 1999.
Ce n’est pas du tout le premier album des Roots, c’est même leur quatrième, mais c’est sans doute le plus réussi. En tout cas, à leurs yeux, c’est celui dans lequel ils ont enfin réussi à dire ce qu’ils avaient envie de dire, avec les bons mots, les bons samples, les bonnes instrus. C’est le disque de l’accomplissement, et aussi du succès commercial. C’est sur ce disque que l’on entend notamment les titres “Double Trouble” ou “You Got Me”.
Déjà depuis la fin des années 80, tout fan de rap sait que les Roots sont des artistes à part, qu’il soit de Philadelphie comme le groupe, de Londres ou d’ailleurs. D’abord parce que ce sont de sacrés musiciens, ?uestlove est un batteur dingo, Black Thought a une voix et une parole si justes. Mais eux-mêmes, n’en ont peut-être pas encore totalement conscience. Et puis, ils ont une vision à part dans le milieu, ils ont l’œil perçant et voient loin.
Le rap à la Puff Daddy ne les intéresse pas. Ils lui préfèrent l’incisivité du Wu-Tang, la douceur des Digable Planets et la spiritualité du jazz.
Et avec cet album Things Fall Apart, ils vont trouver leur voie, au milieu de toutes ces références et ambitions, dont ils vont s’inspirer sans jamais rien en recopier. ?uestlove dira plus tard qu’il est particulièrement fier de ce disque. Parce que ses amis et icônes, D’Angelo, J Dilla avec qui il a bossé en tant que Soulquarian, vont se rendre compte qu’il n’est pas qu’un batteur, qu’il est aussi un bon producteur. Ils vont bluffer leurs pairs.
Au-delà de cette reconnaissance du milieu, c’est le monde entier qui va comprendre qu’il y a chez les Roots un petit côté messagers descendus sur terre. Ils sont là pour chanter la question noire américaine, notamment dans l’art, pour prévenir de la désincarnation du rap commercial, pour créer une filiation entre le jazz, le rhythm’n’blues, la soul et le hip hop.
Ce disque est aussi l’œuvre la plus aboutie du groupe grâce à ses collaborations – on entend quand même Jazzy Jeff, Common, Dice Raw, Mos Def, Erykah Badu, sur l’album. Et qu’est-ce qu’il est bien produit, élégant, équilibré, profond, tissé.
Bref, un joyeux anniversaire pour ce disque incroyable.