Cinq années séparent la sortie de Currents, le dernier album en date de Tame Impala au succès colossal (les tubes « The Less I Know the Better » ou « Let It Happen » y figuraient) de The Slow Rush, qui sort aujourd’hui. À la vitesse à laquelle vont au XXIe siècle et dans l’industrie du disque, les choses, c’est une temporalité importante. Kevin Parker, ainsi, a pris son temps ou, comme il le suggère lui-même, s’est « pressé lentement ».
Il faut dire que certaines embuches, qui sont mêmes devenues parfois des cendres, se sont dressées sur le chemin tortueux qui a mené à la construction de ce quatrième album studio. Il y a d’abord eu cette tentative EDM, menée aux côtés de ZHU, et qui a abouti à une déception telle que l’Australien, qui est né à Sydney mais qui a grandi à Perth, a dû rebrousser chemin et revenir sur les territoires pop et psychédéliques qui avaient fait, au temps de Currents et avant (les albums Innerspeaker et Lonerism, bien plus psychédéliques dans leur intention) son succès. Et puis, il y a eu la tragédie de novembre 2018 où, et alors qu’il venait de s’installer dans une villa de Malibu afin de poursuivre la construction de ce quatrième album studio, des feus terribles avaient commencé à ravager les comtés de Ventura et de Los Angeles, l’obligeant à quitter les lieux de manière précipitée. Kevin Parker n’avait alors récupéré dans sa fuite que son laptop et sa basse fétiche, laissant derrière lui une partie de son matériel, et une villa qui, quelques heures plus tard, devait être emportée par les flammes violentes de la Californie…
Un incendie qui ne l’empêchera pas, et la démarche est l’inverse de celle qui était la sienne au début de sa carrière — sur InnerSpeaker, on entendait par exemple uniquement que cinq instruments — d’utiliser finalement plus de cinquante instruments pour enregistrer ce disque, et de se charger, une fois encore, de l’entièreté de sa composition, de son enregistrement et même de son mixage. On n’est jamais mieux servi que par soi-même, comme le dit l’adage…
Le temps, ainsi, figure au cœur de ce nouveau disque, de sa pochette qui rappelle Dali aux titres de ces morceaux (« One More Year », « Tomorrow’s Dust », « Lost in Yesterday »…), ou plutôt, sa fuite inexorable, celle qui fascine les plus grands artistes, depuis Lamartine jusqu’aux Nèg’ Marrons. Si la nostalgie obsède Kevin Parker depuis les débuts (ne chantait-il pas déjà « It Feels Like We Only Go Backwards » en 2012 ?), il semble aujourd’hui la reconnaître comme une addiction. Sur « Lost In Yesterday », extrait que l’on vous joue à l’antenne sur Nova, le chanteur paraît même apaisé, s’enfonçant dans le souvenir comme dans un sable mouvant. « Ô temps ! Suspends ton vol », écrivait Lamartine. « One More Hour », supplie pour sa part Kevin Parker et Tame Impala quelques deux siècles plus tard, au sein d’une démarche qui identifie, une fois encore, l’ennemi éternel et insurmontable de l’humanité toute entière.
Nova vous offre des exemplaires de The Slow Rush ! Joue juste en-dessous avec le mot de passe de la page Nova Aime.