Un web documentaire qui place la relation humaine au coeur d’un échange digital.
Pour essayer de vous expliquer ce qu’est Stainsbeaupays, il faut prendre du temps, comme les deux réalisateurs Simon Bouisson et Elliot Lepers qui ont pris un an de leurs vies pour s’installer auprès de Illiès, Moustic, Chris et 17 autres adolescents . Une classe de 3e de 14 ans de moyenne d’âge à Stains. Pendant une année scolaire, avec une caméra, des rudiments de tournage et et une immense envie de raconter sa vie de part et d’autres, ces jeunes enfants ont réalisé douze films courts. une mise en abyme de fictions et des documentaires qui nous plongent dans leur quotidien, leurs vies, leurs mondes. et au travers de ces entreprises ce sont des portraits de chacun d’entres eux qui se dessinent.
Ce sont de belles histoires, de belles individualités narrées dans une pluralité des angles, des points de vues, que les nouvelles écritures de France télévision nous proposent avec ce Web Documentaire
L’idée est simple mais elle est parfaitement bien traitée. Deux réalisateurs qui s’immergent au sein d’un groupe d’adolescent est déjà vue. Il pourrait s’agir d’un énième web doc qui ne fait que mettre sur internet un documentaire au sein duquel on considère comme pertinent de demander à l’internaute de cliquer sur des liens pour naviguer dans la trame.
Mais ici l’interactivité est mise au service de l’humain. Elle prend sens car il s’agit d’un vrai échange fondé sur le rapport humain, et pas ajouté de façon artificielle.
Le parti pris consiste à accepter l’intérêt du quotidien, de prendre le temps de comprendre que les habitudes de nos adolescents en disent long sur notre société.
Mettre en lumière ceux qui ne le sont jamais non plus, sans tomber dans l’utilisation, dans l’argumentaire, il s’agit seulement de révéler une rencontre.
Il est précisé que tous ces adolescents filmés sont rivés chaque soir devant NRJ 12, monolithe culturel dont le film se détourne pour s’intéresser à la société du non-spectacle, et grâce à laquelle on apprend à se comprendre soi même. Passer de l’autre côté du tube cathodique pour aller rencontrer ceux que la télé façonne alors qu’ils devraient façonner la télé.
La réussite véritable de Stainsbeaupays est qu’il s’agit d’un prolongement technologique de l’échange humain dans l’interaction digitale du Web documentaire. On a la réelle impression d’échanger des moments de vie avec ces adolescents. C’est une interaction sur un triple procédé qui s’est mis en place :
– Entre les adolescents tout d’abord.
– Entre les les sujets du film, qui transforment et créent la matière dans laquelle il évoluent (12 courts métrages), et la production en elle même, .
– Et enfin le rapport aux réalisateurs qui dirigent de façon très furtive ce groupe dont il chorégraphient presque les interventions, en leur laissant une liberté absolue.
Ces nouvelles écritures, ces interactions entre les acteurs et ce qu’ils produisent mais aussi le voyage qui est laissé libre au spectateur/internaute dans sa démarche de découverte d’un univers qui s’ouvre à lui, permet une narration à taille humaine, une immersion dans un monde qui nous est raconté par ceux qui le vivent. Ce choix permet du coup de s’éloigner d’un certain nombre de clichés de narration et de réalisation qui accompagnent généralement ce genre de documentaire « d’immersion » chez des adolescents et encore plus lorsque qu’ils viennent de banlieue.
Enfin une timeline circulaire est insérée au centre du documentaire, permettant une navigation libre et non pas linéaire, une mise en relation entre toutes les personnes du film, une ronde qui déconstruit le documentaire comme une histoire éphémère mais donne le principe d’échanges renouvellés et à notre image.
Mis en ligne le 3 décembre. et diffusion dans cet article!