La vague exaltée racontée dans un très bel ouvrage.
Un livre sur le « Rock Progressif », oublié ou mal aimé ( ?) , en tout cas Frederic Delage nous sert le menu complet, avec 100 albums, au zénith de cette envolée Rock n Rollienne, qui occupait Johnny Rotten avant qu’il ne devienne Roi des Punks.
Car que fut le PROG ROCK ? A peine remis des multiples merveilles des années 60, aussi bien anglaises que américaines, les fans de Rock, Blues, Folk ou Rythm and Blues virent jaillir un drôle de jeyser vers 1967…
La légende veut que ce soit le SERGENT PEPPER des Beatles qui ait amorcé le feu d’artifice, avec les arrangements classiques et philarmoniques du cinquième Beatles GEORGE MARTIN. Violons et orgues, crescendo et fanfare, cuivres et MELLOTRON. Le Rock, déjà éclaté par le PSYCHEDELISME et autres délires hallucinatoire en voulait plus. Batterie, guitares ne suffisaient plus : les audacieux s’emparèrent alors des cuivres, orgues et clavecins, violons et violoncelles et tous les claviers pour tenter de s’envoler idéalement plus haut, puisque plus équipés.
Les MOODY BLUES avec « Night in white satin », PROCOL HARUM avec « A whiter shade of pale », ou David Mc Williams et « Days of Pearly Spencer », avaient sauté dans le même train du romantisme mélancolique que les FAB FOUR avec « Strawberry Fields » ou « A day in the life » …
Le Temps était venu de l’orchestration (!), crime de dilution pour les purs Rockers, mais grand terrain de jeu pour tous les aventuriers idéalistes de la POP débridée.
Bien sur il y aura PINK FLOYD, à la lenteur planante, mais accordons une place à part pour SOFT MACHINE et son inimitables bande, mère de la mystérieuse école de Canterbury : Daevid Allen, Kevin Ayers et Robert Wyatt, dont le mérite – ou le défaut, selon les goûts – sera d’avoir une inspiration jazzy mais surtout DADAISTE .
Et si l’Angleterre de cette fin sixties est une pépinière de talents, l’Amérique veut aussi y croire avec les BEACH BOYS et leur album symphonique « Pet Sounds », avec ses cœurs et ses mélodies décalées en canon, puis Frank Zappa, le cynique, avec ses stridences et ses breaks, se prenant pour Stravinsky ou Dvorak…
En 1969, le groupe de Robert Fripp modestement intitulé KING CRIMSON, va estampiller le terme « Progressif ». Mais la liste va être longue de tous ceux qui sont pris dans la spirale PROG : tous les précités, plus Genesis ( avec Peter Gabriel et Phil Collins), Vanilla Fudge, Van Der Graaf Generator, et aux US : Jethro Tull, Emerson Lake and Palmer et Yes pour ne citer que les principaux.
Les couvertures des albums vont aussi se différencier du précédent Pop Rock, et passer des photos de groupes en grandes tenues à un style illustration, rétro, flirtant avec la science fiction rayon HEROIC FANTASY, mais il y aura aussi des gravures, des peintures et des paysages et même des vaches et des lutins, les jeux de rôles inspirés de TOLKIEN ne sont plus très loin …
Le Rock atteint alors son âge de raison avec chansons prise de tête et envolées lyrico-poétiques, approche de mondes nouveaux, de nième dimension , des paroles pour penser, planer, imaginer, s’échapper encore de la réalité terne…
Passer de l’Underground au Mainstream, ce sera fait avec Mike Oldfield et ses « Tubular Bells », cloches tubulaires, mais vrai tube mondial qui va faire la fortune de Richard Branson et de son label naissant VIRGIN… en 1973. (répétition du même thème de 8 notes sur orgue avec écho ! utilisé pour l’ »exorciste » ! Christian Vander du groupe français Magma, dans le même studio au même moment, prétend que ce thème lui a été volé.. une sorte d’extrait de Mëkanik Kömandöh…)
Un des mérites de ce livre complet c’est de présenter aussi tous les groupes du COME BACK du Prog Rock des années 2000 avec Radiohead, Mars Volta, Sigur Ros, Archives… et bien d’autres dont je me garderai de parler, Frederic Delage le faisant bien mieux que moi.
Comme quoi, même un aspect décrié du Rock peut revenir comme un boomerang, car la CHOSE était riche d’influences et de possibilités.
_ PROG 100 . Le Rock Progressif des précurseurs aux héritiers . Par Frederic delage Editions Le Mot et le Reste. 250 pages . 21 Euros