Bons élèves inutiles.
Il y a une bonne solution pour écrire un roman sans trop s’emmerder à faire risette au lecteur, le charmer, l’attirer, le garder ( ce qui est assommant, voire putassier…)
Cette issue, c’est d’écrire ce que l’AUTEUR REVE DE VIVRE ou de voir. Quand Ian Fleming a écrit James Bond, c’est ça : Il s’amuse, rêve qu’il est le héros, agent secret, beau riche et irrésistible, couvert de femmes. C’est bête et ça marche.
Deux livres récents me font penser à cette démarche. Le Rock Reac d’Henry Chartier et La 7eme fonction du langage de Laurent Binet. Les deux auteurs sont profs.
Le premier est tout simple : Mr Chartier se défoule sur les stars du Rock qu’il qualifie de réactionnaires, avides capitalistes, n’aimant que gloire et argent.
Et bien oui Mr Chartier, la star Rock EST dominatrice, égotiste, irresponsable, incohérente etc…Depuis toujours.
Les Divas du Rock veulent paraître, briller, flasher, choquer et ils y réussissent pas mal. L’auteur vitupère contre ces êtres doubles qui chantent la révolte et la rébellion et gèrent leurs affaires comme les pires financiers.
Et pour ce faire il abuse des pires : Jagger, Mc Cartney, Bono, Geldof… Les plus riches qui, en prime d’hypocrisie, flirtent avec les organismes de charité, d’aide aux démunis.. Pour s’enrichir. C’est très laid, mais évident. 300 pages pour rabâcher ça ?
Et que dire des centaines de groupes dont la carrière fut plus honnête, magique et intéressante que ces people ?
Monsieur Chartier s’est défoulé, mais le Rock reste bien plus complexe, tortueux, contradictoire, symbolique… manifestation étrange ou la cérémonie cathartique se double d’hystérie collective, de sado masochisme, d’esthétique, de violence..
Monsieur Binet lui a travaillé davantage : après le licencié, l’agrégé.
Sa 7eme fonction est un polar SEMIOLOGIQUE ou l’auteur étale sa science pour PIETINER les idoles des années 60-70
Barthes, Foucault, Sollers, Kristeva, Deleuze, Althusser etc.. Tous les maitres à penser sont torchés, grâce à une enquête comico policière qui suit la mort de Roland Barthes.(1980)
Même Mitterrand et ses puces savantes y passent ; Attali, Lang, Fabius .. Giscard se fait également déchirer, avec ses Dupont, Ornano et Poniatowski. C’est un carnage.
L’auteur donc s’amuse ( tout seul) à malmener les puissants, les célèbres, leur faire prendre du LSD, se faire sucer dans un hammam ou vomir dans un taxi, et même se faire émasculer.
Record donc d’irrévérence pour Binet qui réussit l’exploit, – avec un roman délirant, burlesque, grotesque, ou les grands de ce monde se comportent comme des Punks -, à être lourd et ennuyeux !
Normal : 500 pages ( ah, les profs!) avec trop de références culturelles, philosophiques, universitaires et casse couilles ( pour bien montrer combien l’auteur est cultivé), ça tue le délire organisé de cette énigme paranoïaque et schizo.
Comme je le disais au début, les deux auteurs se sont grave défoulé !… Et tous deux s’ébattent dans cette grande folie des intellos récents de tout réviser, renverser, détruire (même ce qui est à peine digéré) quitte à se tirer une balle dans le pied.
Mais il faut en finir : je soupçonne Chartier et Binet de vouloir bruler ce qu’ils ont adoré et je parie que l’un rêve d’être Mick Jagger, et l’autre Roland Barthes .
Le ROCK ( est il) REAC. Posture et imposture du Rock . par Henri Chartier . Editions Carpentier . 245 P ; 18E90
La 7eme FONCTION DU LANGAGE.De Laurent Binet. Editions Grasset . 500 pages ! Prix ….Sortie de 28 aout 2015.