Suite à la mort du célèbre présentateur Thierry Ardisson, de nombreux·ses journalistes lui ont rendu hommage, au point d’effacer l’héritage clivant de l’homme en noir.
L’un des animateurs les plus importants de la télévision française nous a quittés. Thierry Ardisson est mort d’un cancer, à l’âge de 76 ans. Le poids médiatique du journaliste est tel que ’Élysée a pondu un communiqué-hommage.
Thierry Ardisson était déjà une voix et un “bonsoir” singulier lorsqu’il prenait l’antenne.
Les hommages médiatiques suite à la mort du journaliste se sont succédé, faisant jusqu’à la Une de grands journaux, comme Libération. Dans les rédactions, on appelle ces hommages, qui résument notamment les carrières, des « nécros » (ou nécrologie), une sorte de biographie d’une personnalité décédée. Globalement, les hommages étaient élogieux.
“Homme en noir”, car il s’habillait en noir, le monument du paysage audiovisuel français a passé 35 ans devant l’écran. Les médias ont surtout utilisé le mot “provocations” pour le décrire – ce qui est un doux euphémisme.
Hommages et critiques : le deuil du sexisme télévisé ?
Thierry Ardisson a été aussi le relais de beaucoup de pratiques que l’on aimerait oublier à la télé. D’un côté, l’émission culte “Tout le monde en parle” réunissait jusqu’à plus de 2 millions de téléspectateur·ices, traduisant un vrai phénomène de société. En même temps, Thierry Ardisson pouvait aller trop loin, être humiliant, misogyne, ce que beaucoup d’internautes hier ont relevé en expliquant que les “nécro” ne devait pas effacer le côté clivant du journaliste.
Thierry Ardisson donnait également la parole à des gens peu fréquentables, à des complotistes par exemple. Hier, dans ce flot d’hommages positifs, on ne peut ignorer par exemple le post Instagram de la journaliste Cécile Delarue.
Cécile Delarue a listé des archives vidéos problématiques dans lesquelles on voit Ardisson dans des séquences sexistes. Elle écrit “« Tout le monde en parle », c’était ça, nous tous derrière le poste à regarder des filles se faire laminer”.
Alors comment rendre hommage à quelqu’un qui a été visionnaire dans son métier, mais qui aussi franchit la ligne de l’acceptable pour de l’audience ? Peut-être par la nuance ?
Par exemple, Nicolas Mathieu, Goncourt 2018, a posté un hommage sur Instagram en saluant « le seul animateur qui l’aura fait lire » mais évoque « des comportements odieux et des manières qui naturellement n’ont plus droit de cité ».
L’autre critique qu’on avait pu faire à Thierry Ardisson était celle de la peopolisation des hommes politiques et même de la dégradation de leur fonction. À Michel Rocard, ex-premier ministre, il avait notamment posé une question, devenue mythique : est-ce que « sucer, c’est tromper ? »

