Compte-rendu d’une soirée en apesanteur
Son nom fait penser à un homme fier de sa force, prêt à tout pour rentabiliser ses magouilles et vivre une vie de rêve. Voilà comment on aurait pu imaginer Kartell avant son arrivée derrière les platines. Las, chargé d’inaugurer cette nouvelle édition du Nova [Mix] Club depuis les abysses du Point Perché, le DJ avait un peu la tremblote à l’heure de prendre le micro pour répondre aux quelques questions censées lancer son set. Disons, à sa décharge, que le bonhomme est plus habitué à s’exprimer à travers sa musique. Evidemment. Cela dit, l’ami Kartell s’est très vite ragaillardi en balançant une série de réponses parfaitement trouvées. Un vrai trafiquant de bons mots, ce DJ ! Pour les connaître, il fallait y être. Et toc.
Et puis, c’est bien évidemment à l’heure de démarrer ses affaires aux platines que Kartell s’est trouvé le plus confortable. Ce proche du label parisien Roche Musique s’est attaché à goupiller une house azuréenne parfaitement calibrée sur ce joli sentier de fin de trimestre que nous mènera bientôt à la saison estivale. Le bleu des néons du Point Perché faisait subitement écho au ciel qu’imagine Kartell quand il produit sa musique. Et sous terre, il faisait sacrément soleil.
Dans la foulée de ce set coloré, c’est le noir qui a repris ses aises avec l’arrivée au booth de La Mverte. Brettelles tendues sur les épaules, moustache fine qui lui barre le visage, un pantalon sombre serré aux chevilles, voilà à quoi ressemble l’ange de la mort ces temps-ci. Croque-La Mverte n’est pourtant pas un type qui débarque de nulle part, enfer et paradis confondus. Celui qui sert aussi de clavier au producteur et chanteur français Yan Wagner bénéficie aujourd’hui du soutien de l’impeccable Red Bull Music Academy. Après avoir participé à une session de production et de réflexion à Tokyo, La Mverte fréquente aujourd’hui tous les festivals qui comptent, des Nuits Sonores lyonnaises à la Villette Sonique parisienne jusqu’au Sonar barcelonais. Point musique quand même : voilà de l’electro un brin clash, qui grésille, qui vrombit et qui strie l’air. Sombre comme la Mverte, donc. On en aimerait presque la mort.
Du côté du Nova Mix Club, les saisons et les humeurs fusent dans un ballet incessant qui ferait presque perdre les sens. Il faisait beau avec Kartell, sombre et pluvieux avec La Mverte. Voilà le beau temps de retour avec Betty. Plutôt loop que Boop, la DJ proche du vieux routard Teki Latex a débarqué de Londres dans un coup-vent jaune poussin comme le maillot des footeux brésiliens. Justement, c’était du Brésil dont il fut notamment question le long de son set : passé l’ouverture, c’est dans une baile funk enivrante sur les hauteurs de Rio que Betty a emmené le public du Point Perché. Il ne pleuvait plus. Il suait.
Pour conclure cette nouvelle émission, il fallait boucler la boucle en remisant une nouvelle fois la couleur et la lumière sous les platines. Fabien et Julien avaient des manteaux noirs siglés du même nom : Torb. Un duo qui commence à faire son petit effet électrique à force de sets grondants et obscurs comme l’espace infini dans lequel ils se projettent. Pour ce drôle de voyage astral, le duo chevauche une drôle de carcasse fuselée composée de synthétiseurs bidouillés et rebidouillés, superposés les uns sur les autres. Voilà deux tours infernales aux airs de space mountains. Plus perchés, tu meurs.